
Pour moi, il est primordial d’accueillir le client en tant qu’individu, et non comme un simple cas ou un dossier. Chaque personne a ses besoins, ses désirs et ses émotions, et il est impératif d’identifier ces éléments de manière approfondie pour élaborer une stratégie juridique adaptée.
Victoria DUCHESNE-LIMA
Dans le cadre du développement de son Desk Brésil à Lyon, Lozen Avocats a récemment renforcé son équipe et accueilli Victoria DUCHESNE-LIMA pour son stage de Master 2 en Médiation à l’Université Lyon 2.
Victoria DUCHESNE-LIMA vient enrichir le Pôle famille du Desk Brésil avec ses regards croisés sur le droit franco-brésilien !
Avocate inscrite au Barreau de São Paulo et diplômée d’une double licence en droit français et brésilien à l’USP (Université de São Paulo), Victoria vous a déjà concocté plusieurs articles sur le droit de la famille pour les couples franco-brésiliens 🤓.
Mais avant de vous plonger dans ses articles captivants (lesquels seront publiés très prochainement sur le site de Lozen Avocats), nous vous proposons de faire sa connaissance 😉.
Salut Victoria ! Tout d’abord, merci de partager ton parcours avec nous. Peux-tu nous raconter comment tu en es venue à étudier le droit à l’Université de São Paulo (USP), qui selon nos sources, serait la meilleure université de droit du Brésil ?
Salut, Anne-Caroline ! Je te remercie de ce temps d’échange ! C’est un plaisir d’être là aujourd’hui.
Alors, c’est une histoire peut-être un peu atypique…
En sortant du lycée j’ai intégré l’Université Fédérale de São Paulo (UNIFESP) pour suivre une licence en biomédecine. Je voulais être scientifique, quelle idée ! Au bout du premier semestre je me suis rendue compte que la physico-chimie n’était absolument pas ma tasse de thé et finalement j’ai découvert ma passion pour le droit.
L’Université de São Paulo (USP) était un rêve pour moi, mais j’étais face à un défi de taille car l’admission était basée sur un concours hautement compétitif, et j’avais moins de trois mois pour me préparer à cet examen après avoir quitté la faculté de biomédecine. Je n’avais pas d’autre choix que de me plonger dans d’intenses révisions. Mes journées d’étude commençaient tôt, vers 7h30 du matin, et se prolongeaient jusqu’à 22h le soir, du lundi au samedi. C’était une période éprouvante, mais ça en valait la peine !

Tu seras bientôt titulaire d’une maîtrise en règlement de conflits au Canada, on peut dire que tu n’es pas sédentaire ! Comment cette expérience pourrait-elle enrichir ta vision du droit et du règlement des différends ?
Il est indéniable que le Canada a développé de nombreux concepts en matière de résolution des différends, qui servent de source d’inspiration à de nombreux pays, dont la France et le Brésil.
Pour moi, avoir l’opportunité de partir bientôt à l’Université de Sherbrooke pour poursuivre mes études représente une énorme chance pour explorer davantage leurs approches des différentes méthodes de résolution des conflits et du droit collaboratif. De plus, changer d’environnement et sortir de notre zone de confort est toujours bien pour accueillir de nouvelles perspectives, donc j’ai vraiment hâte de vivre cette expérience au Canada et suis ouverte aux changements qu’elle pourrait apporter.
À mon retour, je partagerai volontiers mes découvertes avec toi !
Tu as également obtenu une double licence en droit français et brésilien, c’est impressionnant ! Peux-tu nous expliquer en quoi cela t’est utile dans le cadre du stage que tu effectues actuellement au sein du cabinet Lozen Avocats ?
Ce programme de double licence était vraiment une chance pour moi ! J’ai eu l’opportunité de suivre de cours magnifiques, surtout en droit administratif français et en droit de la famille. Bien que le droit brésilien garde beaucoup de similitudes avec le droit français, avoir une base plus solide et approfondie dans la législation française a été d’une richesse énorme pour moi et maintenant je suis capable d’appliquer ces connaissances théoriques dans le cadre de mon stage chez Lozen Avocats !
Actuellement en Master Justice, procès et procédure / Médiation à l’Université Lyon 2, tu sembles très axée sur le règlement amiable des conflits. Peux-tu nous en dire plus sur ton choix de devenir Avocate & Médiatrice en France ?
Au Brésil, mes expériences étaient davantage axées sur le droit administratif et réglementaire, ce qui me plaît toujours beaucoup, mais le côté “humain” des relations me manquait. Après avoir suivi des cours de MARC au Brésil, j’avais envie d’ approfondir mes connaissances et c’était à ce moment-là que j’ai trouvé ce master. J’ai été très vite attirée par la maquette de cours et, comme j’étais déjà étudiante en licence à Lyon 2, le choix m’a paru très évident. Les cours m’ont tout de suite beaucoup plu et j’ai trouvé ma vocation ici.
Tu es déjà avocate au Brésil, inscrite à l’Ordre de São Paulo. Comment se passe la transition entre le système juridique brésilien et français pour toi ?
J’ai eu la chance de suivre un double diplôme de licence en droit franco-brésilien, ce qui a beaucoup facilité la transition. De plus, il existe de nombreux points de convergence entre le droit français et le droit brésilien, étant donné qu’ils partagent la même base de droit romano-germanique. Au début, les matières qui m’ont donné le plus de fil à retordre étaient le droit administratif et le droit de l’Union européenne, en raison des différences qui n’avaient pas d’équivalent au Brésil. Cependant, maintenant avec la pratique, cela me pose moins de difficultés.
Tu rédiges actuellement une série d’articles de droit comparé entre le droit français et brésilien de la famille. Peux-tu partager un petit aperçu des principales différences que tu as identifiées entre ces deux systèmes ?
Oui !
En fait, même si l’on partage la même racine, il arrive parfois que de légères différences se soient développées en réponse à l’évolution de la société et des coutumes culturelles dans chaque système juridique. Au Brésil, par exemple, un équivalent du « PACS » français a été conçu pour les couples qui ne souhaitent pas contracter le mariage, mais qui ont de forts liens familiaux : l’union stable. En effet, les juges ont constaté que souvent les couples n’étaient pas mariés, mais partageaient une vie commune, avaient un patrimoine ensemble, et avec la dissolution de l’union, soit par séparation, soit par décès de l’un des partenaires, l’autre se voyait sans la protection du droit de la famille. Cette situation était fréquemment désavantageuse notamment pour les femmes qui n’exerçaient pas une activité rémunérée pour prendre en charge le foyer et les enfants. Ainsi, la jurisprudence a évolué pour assimiler les droits découlant de l’union stable aux droits classiques du mariage, dans l’objectif de conférer plus de droits aux partenaires.
De plus, cette union est déclarative, ce qui signifie que les partenaires n’ont même pas besoin de signer un contrat formel pour l’officialiser (même s’il est fortement conseillé) ! C’est une différence significative qui n’a pas de correspondance directe entre les deux législations, et cela me surprend toujours.
Les modes amiables comme le droit collaboratif et la médiation familiale prennent une place de plus en plus importante dans notre système juridique. Peux-tu nous expliquer pourquoi ils sont essentiels dans le contexte du droit de la famille en France et au Brésil ?
Les affaires relevant du droit de la famille sont toujours délicates, impliquant des besoins spécifiques et une gamme d’émotions souvent complexes, parfois fortement conflictuelles, et qui demandent une attention particulière.
Le système judiciaire malheureusement ne peut pas toujours offrir une réponse assez réactive à ces questions, en vue des limitations qui lui sont propres et du volume élevé de litiges qu’il traite quotidiennement. De plus, les décisions prises par un juge ne sont parfois pas pleinement intégrées par les parties, pour différentes raisons.
En revanche, la médiation a le pouvoir d’être un outil au service de la facilitation de la communication et renouement des liens relationnels. Le médiateur a pour principal objectif de créer un espace sécurisé où les parties peuvent s’exprimer et, éventuellement, parvenir à une solution adaptée à leur réalité. De la même manière que dans la pratique du droit collaboratif, qui encourage la négociation transparente et de bonne foi, dans la médiation, les parties sont les acteurs principaux de leur propre résolution de conflit, et les tiers fournissent les outils nécessaires pour les aider à trouver une solution.
Je crois que dans le domaine du droit de la famille, que ce soit au Brésil ou en France, il est essentiel que les professionnels compétents accompagnent les transitions et les éventuels conflits des parties avec beaucoup d’expertise et dans un cadre spécifique. Cependant, il est tout aussi important de leur accorder un rôle central dans un environnement sûr, en leur donnant l’autonomie nécessaire pour déterminer ce qui convient le mieux à leurs besoins. Après tout, il s’agit de leur famille, et personne ne connaît mieux que les parties elles-mêmes les dynamiques familiales qui les animent
Tu contribues actuellement au Pôle famille de Lozen Avocats, quelle serait ta vision du développement du Brésil Desk afin d’aider les clients dans leurs affaires familiales franco-brésiliennes ?
Déjà, je trouve que l’une des compétences les plus essentielles pour un avocat est l’écoute active, afin de réellement comprendre la situation de manière holistique. Pour moi, il est primordial d’accueillir le client en tant qu’individu, et non comme un simple cas ou un dossier. Chaque personne a ses besoins, ses désirs et ses émotions, et il est impératif d’identifier ces éléments de manière approfondie pour élaborer une stratégie juridique adaptée.
En tant qu’avocate, je suis très soucieuse des aspects juridiques objectifs et de la technique, mais je suis persuadée qu’il est tout aussi crucial de prendre en considération l’ensemble du contexte subjectif si l’on souhaite accompagner au mieux nos clients. À mon avis, cela est particulièrement vrai dans le domaine du droit de la famille.
De plus, pour les questions englobant les familles composées de personnes de différentes nationalités et de cultures variées, je crois qu’il faut avoir une attention encore plus particulière, tant du point de vue juridique que sur les aspects pratiques des éventuels changements dans la configuration familiale. Je suis particulièrement touchée par ces questions, ce qui me sensibilise encore plus à trouver des solutions qui concilient au mieux les intérêts des clients.
C’est donc avec cette sensibilité que j’oriente mon travail et que je vois comment je peux contribuer au développement du Brésil Desk et à apporter une véritable assistance aux clients dans leurs affaires familiales franco-brésiliennes.
Hors du domaine du droit, quelles sont tes passions et centres d’intérêt ? Que fais-tu pour te détendre et te ressourcer ?
La littérature, la musique, les voyages et l’étude de langues sont mes pierres énergétiques. Je suis profondément curieuse du monde et de l’humanité, et j’adore explorer. Je suis enthousiaste à consommer différentes formes d’expression culturelle de divers pays et essayer d’imaginer comment la vie peut varier en fonction de notre position géographique et de notre milieu social. J’adore également étudier différentes langues pour avoir accès à différentes formes d’expression et essayer de comprendre plus d’une culture. Par exemple, j’ai appris l’alphabet grec pour pouvoir explorer le hip-hop grec et c’était l’envie de lire “Les fleurs du mal” de Baudelaire dans la version originale qui m’a poussé à apprendre le français la première fois.
De plus, j’apprécie tout ce qui me pousse à me confronter à moi-même. La méditation, le yoga, le qi gong, des formations sur le développement personnel, tout cela m’incite à remettre en question mes propres convictions et valeurs de temps en temps, et à réfléchir sur ma quête dans ce monde.

Enfin, si tu avais un conseil à donner à de jeunes étudiants en droit ou à de futurs avocats, quel serait-il ?
Une grande dose de détermination, de courage, et une solide conscience de soi sont essentiels ! C’est un cliché, mais il demeure vrai. Le monde du droit nous confronte à de nombreux défis, et il nécessite des personnes courageuses, assoiffées de justice, et dotés d’un sens critique, toujours en quête d’amélioration. Autrefois, la rigidité et l’intransigeance dans l’application stricte de la règle étaient considérées comme synonymes de justice. Cependant, les tendances actuelles visent à explorer des solutions novatrices, et de moins en moins rigides et arbitraires.
Il faut donc avoir une grande détermination et du courage pour remettre en question parfois des pratiques bien établies, mais qui ne correspondent plus à l’actualité. Le système judiciaire et les législations sont une puissante force, et nous devons bien les intégrer dans notre pratique. Cependant, il est tout aussi important de rompre avec des traditions inefficaces pour rechercher des solutions véritablement satisfaisantes et, par conséquent, plus réalisables.
Il est tout aussi nécessaire de se connaître soi-même, d’identifier nos limites, ainsi que nos forces et faiblesses, toujours dans le but de poursuivre notre évolution personnelle, qui influence également notre pratique professionnelle.

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